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Hippocrate (saison 3)

Un premier épisode prometteur

 

La saison 3 d’Hippocrate mérite-t-elle les louanges qui lui sont adressées à tout va ? Les deux premiers chapitres de cette série passionnante avaient su dresser un portrait assez éloquent de l’état de déliquescence dans lequel se trouve l’hôpital public. Certes, en voulant intriquer fiction et « documentaire », la série se rendait coupable de situations parfois improbables et d’une certaine angélisation du corps médical. Mais au vue de la difficulté de l’exercice, Lilti s’en sortait avec des honneurs mérités. Le premier épisode, rondement mené, nous plonge directement dans le vif du sujet. Il s’agit de traiter un patient qui oscille entre la vie et la mort. Cette entrée en matière toute en tension est dès lors l’occasion de permettre à Chloé, Hugo, Alyson et Arben de se retrouver. Elle nous rappelle également la dureté de conditions de travail qui ne leur permettent pas d’exercer décemment leur rôle de soignant. On se dit que l’histoire peut commencer.

 

 

Puis vint le néant

 

Or, durant les trois épisodes suivants, d’histoire, il ne sera que peu question. Toujours dirigées par le le docteur Brun joué par le formidable et charismatique Bouli Lanners, les urgences sont saturées. En effet, avec un SMUR fermé et un personnel en sous-effectif pour cause de vacances estivales, quand un patient arrive, c’est la panique et les médecins passent leur temps à appeler les hôpitaux des environs pour leur trouver des places. Et la réponse est inlassablement la même : on ne prend plus personne. Presque aucun cas clinique ne vient ici soutenir une quelconque trame narrative. De fait, la situation vire au catastrophique et la série se contente de nous en apporter lourdement la preuve. De leur côté, nos quatre médecins au grand cœur prennent des initiatives totalement irraisonnées qui aboutissent à un quatrième épisode grotesque où un d’eux se trouve à gérer des malades qui semblent s’être donnés le mot pour lui faire passer la pire nuit de sa vie. Histoire d’ajouter du tragique à une situation qui l’est déjà bien assez, les scénaristes ont jugé utile de s’efforcer grossièrement à ce qu’aucun de ses chers collègues ne puisse lui venir en aide. N’en jetez plus, la coupe est pleine.

 

 

C’était moins une !

 

Alors que la série se dirige tout droit vers un naufrage narratif qui tend à montrer que Lilti n’a plus rien à dire en dehors du fait qu’être employé dans le secteur hospitalier n’est pas une sinécure, les deux derniers épisodes viennent in extremis sauver ce qui peut encore l’être. Et cette prouesse, on la doit une nouvelle fois au personnage du docteur Brun. Lui, le pragmatique qui gère son service avec les moyens du bord quitte à mettre de côté l’humanité inhérente à sa fonction, voit se dresser devant lui le spectre de la désobéissance institutionnelle. Le doute qui s’empare progressivement de lui, rendu palpable par la justesse d’interprétation de Lanners, donne alors du sens aux décisions irréfléchies de ses collègues. Il est ce personnage complexe dont on se plaît à suivre l’évolution et qui procure à toute histoire la dose de conflit intérieur dont elle a besoin. Il était temps. Par ailleurs, même si cela ne contribue pas à la qualité intrinsèque de la série, il est appréciable de sentir l’amour que Lilti voue à la mission du service public tandis que les EHPAD privés sont justement montrés du doigt pour les manquements irréfutables dont certains se sont rendus coupables auprès des personnes âgées qu’ils ont eues en charge. Lors d’une séquence marquante, un médecin libéral venu donner un coup de main (il n’avait visiblement rien de mieux à faire de son temps libre) s’étonne que ses confrères dépensent autant d’énergie à pallier les dysfonctionnements de cet animal au bord de l'agonie qu’est l’hôpital. La réponse, sèche et spontanée, ne se fait pas attendre : ce dernier a fait de ses membres ce qu’ils sont, c’est-à-dire des médecins qui ont, chevillée au corps, la vocation régalienne de soigner. Et si l’âpreté de la tâche qui leur incombe les amène parfois à se détourner de cet éprouvant sacerdoce, une force inextinguible les rappelle invariablement à leur premier amour.

 

 

Bilan

 

Alors oui, Alyson, Arben, Hugo et Chloé nous sont à ce titre foncièrement sympathiques. Par ailleurs, portés par des acteurs bluffants de naturel et une jolie qualité d’écriture, ils sont dotés de personnalités bien marquées qui nous les rendent foncièrement attachants. Reste que pendant plus de la moitié de cette saison décevante, leurs (més)aventures dans les affres du quotidien de soignant les font se débattre dans un scénario à tendance catastrophiste dans lequel Jack Bauer aurait de bonnes raisons de s’immiscer. L’hôpital a beau être en crise, pas sûr que le sujet soit assez vaste pour créer des histoires qui ne tournent pas en rond.

 

 

Disponible sur MyCanal

 

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