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le jeu de la dame

Pour ceux qui vivent sur Mars, c'est l'histoire d'une orpheline qui découvre les échecs dans l'Amérique des années 60. Et qui va devenir une reine de cette discipline.

 

Et comme je suis un individu particulièrement consensuel, je dirais comme beaucoup que c'est très bien. Et pourtant...

 

 

Tout d'abord, la bande-son est omniprésente et envahissante et ne laisse pas la place aux silences. Même les parties d'échecs sont souvent ponctués de clic clac des horloges qui servent à calculer le temps de jeu de chaque joueur. La peur du silence qui ne pourrait pas transmettre d'émotions est un souci récurrent dans les productions modernes. Pour beaucoup de réalisateurs, le silence, c'est le vide. Or, le maîtriser est le signe des plus grands. Ici, on est bien dans une production américaine classique.

 

 

De plus, la trame narrative est très conventionnelle : la montée en puissance d'une autodidacte dans sa discipline. Pas de surprise jusqu'à une fin très (trop) consensuelle. On sait à l'avance où on va et cette histoire nous y amène tranquillement. Oui mais alors quoi ?

 

 

Et bien, le fait est que si on sait où on va, il est clair qu'on a envie d'y aller ! Car on est avec Beth. Elle nous agace, elle nous touche, on aime sa bouille... Bref, il s'agit d'une très bonne performance d'actrice. Et aussi que bêtement, comme dans beaucoup de sujets qui traitent de la réussite d'un anonyme dans sa discipline, on sait qu'elle va devoir franchir des échelons de plus en plus élevés et on a envie de savoir comment elle va se débarrasser du boss de niveau 1, puis du niveau 2 jusqu'au boss final ! Et si la construction du récit est classique , elle n'est pas fade. Il y a des accrocs, des doutes, des perturbations qu'il faudra traverser pour atteindre le but escompté. Et enfin et surtout, cette série transpire ce qu'elle veut nous faire aimer : les échecs. C'est passionnant et on vibre pour un pion qui bouge et les expressions et émotions qui vont découler de ces déplacements.

 

 

Et est-ce une série féministe ? Ben oui dans le sens où on nous montre le rapport homme femmes dans une époque où le rôle des femmes était d'être au foyer et au sein d'une discipline réservée aux hommes. Mais finalement, elle est très bien acceptée et si cela prône un message, c'est plutôt celui du mérite, du travail et du talent que celui d'un pouvoir oppressant de la tyrannie patriarcale qui entraverait ses ambitions.

 

 

Alors oui, il y a des défauts (vraiment, même si mon cœur voulait cette fin, personnellement, celles réclamées par notre cerveau et nos émotions ne sont pas toujours les meilleures), allez-y, vous vibrerez et espérerez naturellement que non, elle ne bougera pas sa tour en d4.

 

 Disponible sur Netflix.  

 

Commentaires: 2
  • #2

    Pierric (lundi, 19 avril 2021 18:00)

    Coucou, C'était ma première critique et c'est loin d'être la plus soignée. Je trouve que tu as raison sur la plupart des points particulièrement sur la musique envahissante et la narration très genrée (on est sur du Rocky). Moins pour l'aspect clipeux mais c'est de mémoire. Je ressortais à l'époque de séries toutes plus décevantes les unes que les autres et celle-là avait au moins le mérite d'être agréablement rythmée. J'ai quand même trouvé qu'elle donnait le goût des échecs de par les défis auxquels elle est confrontée et la montée en puissance de ceux-ci même si tout est en effet très prévisible. La mécanique du jeu n'est pas développée, c'est un parti pris que je trouve compréhensible. Il montre quand même l'état d'esprit de cette discipline qui semble plutôt respecté d'après ce que j'ai pu lire (les concours, les petites salles, le fait que les bons joueurs sont surtout des joueurs qui ont appris leurs bases comme des universitaires connaissent leurs leçons (donc oui, il y a beaucoup de par coeur) , les speed partis). Ils ne sont pas autistes, je trouve que c'est réducteur. Geeks oui, autistes non. Je pense que ça colle avec le milieu. Par contre, son histoire familiale est inintéressante ou sous traitée, plus tous les défauts que l'on a cités. Maintenant que j'ai vu bon nombres de séries depuis, je descends ma note d'un demi point car elle ne vaut pas "the plot against america" ou "the good lord bird". Et puis, certaines séries perdent en saveur quand on y repense quelques mois plus tard. C'est un peu son cas.

  • #1

    David (dimanche, 18 avril 2021 12:22)

    Salut Sériphile du Dimanche,
    et tout d'abord, bravo pour ton blog : je suis vraiment admiratif de la qualité de tes critiques, et je les suivraient avec plaisir.
    Mon premier commentaire ne sera pas vraiment une réponse au tien, puisque de manière moins nuancée que toi, j'en arrive au même constat, sans avoir été influencé par ton avis que je n'avais pas lu.
    Par flemme de tout reformuler, voilà ce que je viens d'écrire à deux amis qui me l'avaient bien vendue, et qui résume assez bien ma position :
    Eh, les gars, j'aimerais bien que vous m'expliquiez les raisons de l'engouement planétaire pour Le Jeu de la Dame, qu'à la maison on a unanimement trouvée plus que moyenne : les 4 premiers épisodes vont du franchement mauvais (E1) au quelconque : musique omniprésente et envahissante, contre-plongées et grands-angles déformants systématiques, travelling à la Shining toutes les deux minutes, l'échiquier au plafond (comble du ridicule, et pas qu'une fois...). Bref, beaucoup d'effets clinquants pour tenter de camoufler un grand vide narratif : tout est ultra prévisible. Même la première partie contre Borgov est sans surprise (si elle gagne, ça ne fera que renforcer l'absence d'obstacles dans son parcours de championne, et si elle perd, on se dit qu'il fallait bien que ça arrive une fois...). Et pour finir, je ne vois pas comment cette série pourrait faire naître l'envie de se mettre aux échecs (il paraît que c'est pourtant bien le cas...) : après 7h, on ne sait toujours pas comment on bouge les pièces, ce qu'est une sicilienne, on ne nous a pas montré le moindre enchaînement de coups qui pourrait susciter un peu notre admiration, et on a la ferme impression que si on n'apprend pas par cœur plein de parties dans des livres, on ne pourra jamais être bon. Sans compter que la plupart de ces joueurs sont montrés comme névrosés et semi-autistes à l'égard du reste du monde : hors des échecs, point de salut dirait-on...
    Sur les trois derniers épisodes on a plus accroché (les personnages s'humanisent davantage) et on s'est pris au jeu d'aller jusqu'au bout, pour connaître la fin qui était finalement prévisible dès le début.
    Au final, le bilan nous semble quand même bien terne, mais face au retentissement mondial que cette série a connu, on reste assez perplexes et incrédules.
    Comme vous me l'avez tous les deux conseillée (je ne vous en veux pas, je suis quand même content de l'avoir vue), je vous laisse le soin de défendre bec et ongles cet (in)contestable chef-d'œuvre...