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One Piece (saison 1)

Luffy et le One Piece

 

Pour peu que l’on s’intéresse à l’univers manga, il paraît inconcevable de ne pas connaître Monkey D. Luffy, le personnage principal de« One Piece ». Ce jeune homme présomptueux, habituellement affublé d’un chapeau de paille, sillonne les mers d’un monde créé pour lui par Eiichirō Oda depuis plus de 100 tomes maintenant. Dès son plus jeune âge, il n’a jamais fait mystère de devenir le plus grand de tous les pirates, celui qui découvrira le One Piece, le mythique trésor de Gold Rodger. Pour la petite histoire, la Marine était parvenue à mettre la main sur cette ancienne terreur des océans et à titre d’exemple, avait choisi de l’exécuter publiquement. Mais au moment de rendre l’âme, ce dernier avait mis au défi les navigateurs en quête d’aventures et de richesses de se lancer à la recherche de son fabuleux butin. Dès lors, beaucoup s’étaient attelés à la tâche mais aucun n’était jusque là parvenu à la mener à bien. Pour autant, Luffy en est certain, il se trouvera prochainement un équipage avec lequel il réalisera son rêve. Certes, son air juvénile et sa silhouette filiforme ne contribuent pas à faire de lui un candidat nature là l’accomplissement d’un exploit aussi périlleux. Cependant, malgré les apparences, lui aussi a des atouts physiques à faire valoir. En effet, depuis qu’il a avalé un fruit du démon étant petit, il a acquis la capacité de modeler son corps comme s’il était fait de caoutchouc. Il n’empêche qu’au moment de faire sa connaissance, le destin ne lui a pas encore souri. En effet, si Luffy a pu prendre la mer, c’est sur une frêle embarcation avec un goéland pour seul et unique compagnon. Si tout est à construire, le voyage peut néanmoins commencer.

 

 

1000 et une déclinaisons

 

« One piece », c’est avant toute chose plus de 100 tomes sortis depuis 1997. Par ailleurs, cela fait maintenant 25 ans, soit plus de 1000 épisodes,que la saga a le droit à son animé. Autant dire que beaucoup de courage et de temps seraient nécessaires à ceux qui souhaiteraient en passer par son visionnage pour se plonger dans son univers. L’occasion et le timing étaient donc parfaits pour que Netflix se laisse tenter par une adaptation sérielle de l’un des mangas les plus célèbres et populaires de la planète. Mais les risques de décevoir les fans de la première heure sans réussir à toucher le public profane semblaient réels. Quelques mois après sa diffusion, force est de reconnaître que la série a su s’attirer les faveurs de l’ensemble des spectateurs. De ce constat, il résulte que non seulement elle est restée fidèle à l’esprit de l’œuvre originelle mais qu’elle s’est en plus dotée des qualités cinématographiques nécessaires à séduire tous les types de public.

 

 

Une belle identité visuelle

 

Tout d’abord, il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que « One piece » opte pour une esthétique basée sur des couleurs vives, rappelant celle utilisée dans les animés dont elle assume la paternité. D’une voile bigarrée composée d’un patchwork de tissus en passant par les teintes capillaires des différents protagonistes, c’est toute une gamme de orange, de vert, et de rouge qui se côtoient joyeusement. Le soleil lui-même émet une lumière dorée rendue aveuglante par l’utilisation habile du contre-jour. Sans jamais paraître outrancier, ce parti-pris participe à l’identité visuelle de la série, à l’instar des styles disparates attribués aux nombreux personnages de l’histoire. Outre le chapeau de paille de Luffy qui s’accorde mal avec son statut de flibustier des mers, on est amené à rencontrer (parmi tant d’autres) un samouraï paré de trois sabres, un homme-poisson orné d’un nez en forme de scie, un clown pirate ou encore un colosse gominé à la mâchoire inférieure doublée d’une imposante barre en métal. Dans « One Piece », les goélands sont parés de casquette de matelot et cela nous semble presque normal. Toute cette faune cohabite dans un univers chamarré qui n’est pas sans rappeler la manière avec laquelle « Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire » jouaient sur les mêmes ressorts artistiques pour instaurer une atmosphère onirique dans laquelle le merveilleux n’était jamais bien loin.

 

 

Un sourire et des amis

 

Cette fantaisie, on la retrouve également dans la description de ce perpétuel optimisme qu’est Luffy lui-même. Quoi qu’il lui arrive, quoi qu’on lui dise, il ne se départit jamais de son sourire parfois malin, parfois moqueur, toujours débordant d’assurance. Cette mine éperdument enjouée aurait pu devenir horripilante. Mais elle est arborée par l’épatant Iñaki Godoy avec un naturel si désarmant qu’elle finit par avoir raison des membres les plus réfractaires de son équipage. Il parvient par ailleurs à communiquer son enthousiasme à des spectateurs enchantés d’avoir affaire à un héros ne doutant jamais de sa bonne étoile même dans les situations les plus critiques. La série n’en oublie pas de dresser les portraits de ses amis en nous narrant leurs parcours personnels sous la forme de petites histoires indépendantes habilement intégrées à la trame principale du récit. Ainsi, hormis le personnage d’Usopp dont les compétences restent à définir et qui, par là-même, manque un peu de consistance, tous ont pour eux une identité propre à laquelle s’ajoutent des fragilités et des zones d’ombre qui les rendent particulièrement attachants bien que gentiment stéréotypés. Si l’on ressent de la proximité à leur égard, c’est aussi que la caméra n’hésite pas à filmer les émotions qui les animent à grands coups de gros plans, de contre-plongées ou de plans larges déformants... Ce faisant, « One Piece » rappelle à notre bon souvenir qu’elle est l’adaptation d’un manga, un genre qui s’est toujours plu à illustrer les sentiments humains de manière souvent exacerbée.

 

 

Gare à la fin !

 

Ces nombreux effets de mise en scène pourraient tout de même s’avérer tape-à-l’œil s’ils ne participaient pas à leur manière à la fantaisie dont ces huit épisodes sont éminemment empreints. Luffy hurle sa détermination à devenir le roi des pirates ? Un rapide zoom arrière nous rappelle qu’il est seul au milieu de l’océan. Les choses se gâtent néanmoins dans la dernière ligne droite de cette saison qui avait jusque là trouvé le ton juste pour nous divertir. Luffy se met en colère. Dès lors, il fronce exagérément les sourcils tandis que la caméra se rapproche de son visage pour bien nous signifier son courroux. Comme si cela ne suffisait pas, il finit par hurler au ciel qu’il n’est pas content du tout... De fait, le manque de retenue de cette séquence tend à annihiler l’impact de son message, à savoir que l’amitié est une valeur fondamentale à laquelle il n’est pas question de déroger. Les amateurs de manga apprécieront peut-être cette expressivité non contenue, les autres, sans doute moins. Dans le même temps, le scénario perd lui aussi en crédibilité quand les raisons ayant amené l’Amiral de la Marine à pourchasser sans relâche l’équipage de Luffy nous sont enfin dévoilées. Ces réserves ne doivent cependant pas nous faire oublier à quel point le plaisir a été grand de voguer en des lieux aux décors somptueux afin d’y vivre des aventures particulièrement enthousiasmantes. Certes, pour se faire, la série a bénéficié de moyens considérables et il aurait de fait été décevant qu’elle ne comble pas nos attentes. Mais elle s’acquitte de sa mission avec une telle ferveur qu’il nous tarde de découvrir les nouveaux défis auxquels Luffy et ses amis auront à faire face.

 

Disponible sur Netflix

 

 

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