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Partie 3 : Epilogues

 

Là où Levi parvient également à remplir le contrat qu’il s’était assigné, c’est dans la portée des messages véhiculés par le dernier épisode, malgré un développement narratif toujours identique à l’original. Il parvient en effet à répartir les différents thèmes abordés au travers de ses deux personnages. Par exemple, celui de la solitude se reporte sur Mira. Comme représentation de la femme indépendante qu’elle est devenue, ce sentiment est assumé et vécut positivement alors qu’il reste un poids pour Johann. Celui de la religion et de l’éducation est quant à lui dévolu à Jonathan. Le judaïsme (Levi ne parlerait-il pas de lui comme Bergman le faisait avec le protestantisme ?) lui confère de la sécurité alors qu’il ne s’agit pour Marianne et Johann que de s’en soustraire. Par ailleurs, on a le sentiment que dans la version de Levi, les personnages sont encore traumatisés et leur processus de reconstruction toujours en cours, alors que chez Bergman, chacun semble avoir trouvé son équilibre. C’est donc au sein de cette dernière que l’on ressent le plus de sérénité. Ils sont beaux et ont construit une relation apaisée et tendre. On les envie et le cocon qu’ils se sont créés semble leur apporter un bonheur que leur quotidien banal ne parvient pas à ternir. Marianne, en tant que femme, aura découvert la puissance que lui procure sa sexualité et donne du sens à sa vie en se consacrant aux autres. Johann après avoir beaucoup lutté (et surtout contre lui-même), aura finalement gagné en humilité et la douceur qui, d’après Marianne, le caractérisait, transparaît enfin dès lors qu’il acquiert la certitude qu’il ne vaut pas mieux que la plupart de ses semblables. Jonathan aura lui aussi perdu du sentiment de supériorité intellectuelle qui le caractérisait. Mais chez lui, la manifestation de cette évolution prendra une toute autre forme : se considérant ni meilleur, ni pire que n’importe quel être humain, il vit dans le mensonge assumé et ne cherche plus à être un homme bon. Cela en devient glaçant quand il s’adresse par vidéo à son enfant et à sa nouvelle femme qu’il trompe allégrement sous nos yeux. De cocon, ici, il n’y a pas. Finalement, entre solitude désabusée et malhonnêteté éhontée, Levi nous offre un épilogue d’une grande noirceur alors même que ses personnages avaient jusque là réussi à garder toute leur noblesse… On n’ira pas jusqu’à conclure qu’en situation de crise, une bonne explosion vaut mieux qu’une discussion apaisée. Mais disons simplement qu’il n’y a pas de remèdes avérés pour affronter l’abandon, la trahison ou le sentiment de culpabilité... et que chacun fait juste au mieux avec ce qu’il est. Mais finalement, que ce soit pour Marianne et Johann, pour Mira et Jonathan, l’amour ressort vainqueur de ces luttes éreintantes, même si sa forme la plus exaltante ne semble pas s'accorder avec le train-train quotidien de la vie familiale et de ses contraintes. Car dans ce cas, le prix à payer s’avère généralement bien plus coûteux que ce à quoi on pouvait s’attendre. Se connaître, s’affranchir de toute injonction extérieure requièrent un travail sur soi dont le succès n’est jamais garanti, même sur la durée d’une vie. Au risque de faire souffrir. Parfois… Souvent…

 

 

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