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The great (saison 1)

Qu’est-elle venue faire dans cette galère ?

 

1745. La jeune et belle Sophie Frédérique Augusta d’Anhalt-Zerbst, fille d’un militaire prussien haut gradé, est heureuse. Elle va épouser le roi de Russie, Pierre III. Élevée dans les grandes cours d’Allemagne et sensibilisée à la culture française et aux nouvelles idées des Lumières, elle rêve de grandeur et d’amour. Arrivée à Saint-Pétersbourg, celle qui deviendra la Grande Catherine de Russie va vite déchanter. Il s’avère que son mari et son entourage ont un mode de vie et des valeurs très éloignés de la vision qu’elle se fait de l’exercice du pouvoir et de ses mœurs. Sans échappatoires, elle va alors chercher à transformer les règles et les codes moraux de la cour de Russie, quel qu’en soit le prix.

 

La naissance d'une femme forte

 

Quand on parle de séries historiques, voilà ce qu’on s’attend à voir généralement : les hommes seront cruels et les femmes seront manipulatrices, il y aura de la violence, du sexe et des complots à foison. Pourtant, ici, dès la vision de l’affiche promotionnelle de la série, on imagine que certains de ces codes risquent d’être chamboulés : Elle Fanning (Catherine II) nous regarde avec un air grave en faisant un doigt d’honneur flouté. A qui s’adresse-t-elle ainsi ? Peut-être à la réalité historique des événements racontés, largement remaniés pour les besoins du récit. Sans doute à l’ensemble des protagonistes de cette histoire, car du statut de femme n’ayant pas le droit à la parole et faisant juste figure de potiche, elle va petit-à-petit s’imposer dans un environnement pourtant sans pitié, sortant malicieusement du rôle qui lui était dévolu. Et éventuellement au genre en lui-même et de ce qu’on est en droit d’attendre d’un tel sujet.

 

 

Un duo détonnant !

 

Car s’il y a quelque chose qui est la plupart du temps absent dans les récits historiques, c’est bien l’humour. Or là, c’est le ressort principal de la série qui peut remercier la qualité du jeu de son duo d’acteurs, Elle Fanning et surtout Nicholas Hoult. La première est excellente en jeune femme ingénue qui devra mettre de côté ses bonnes manières et son romantisme et qui s’évertuera à ne pas perdre la face devant les divers affronts qu’elle aura à supporter. Le second brille en monarque immature, humiliant, imprévisible et sans aucun code moral si ce n’est celui régi par ses propres intérêts. Persuadé d’être aimé de sa cour quand elle rit à ses blagues stupides de peur de se voir disgraciée, il accumule les scènes hilarantes comme ces incroyables parties de chasse. Les personnages secondaires sont eux aussi savoureux avec une mention spéciale pour Belinda Bromilow dans le rôle d’une tante Elizabeth délurée mais pragmatique, toujours suivie de son étonnant élevage de papillons.

 

 

Le palais et (presque) rien d'autre

 

Ici, pas non plus de grandes reconstitutions historiques avec batailles ou scènes de foule. L’ensemble de l’action se passe dans le palais royal, concentrée sur les manigances et les complots qui s’y déroulent. C’est bien vu car cela nous montre à quel point l’intérêt du peuple est exclu de ces jeux de pouvoir. Pierre III n’a comme ambition que d’être un grand roi comme son père quitte à massacrer par principe ses soldats dans une guerre vaine contre la Suède. Et Catherine nous apparaît (en tout cas dans la première partie) comme une femme gentiment égocentrique qui cherche à redonner de la dignité et de la noblesse à cette cour dépravée si éloignée des valeurs qu’on lui a inculquées dans sa jeunesse, sans prendre en compte les particularités de son pays hôte.

 

 

Drôle et cruel à la fois

 

Mais il ne faut pas se méprendre : « The great » est bien plus qu’une simple comédie loufoque. Le rythme enlevé de la mise en scène dépeint superbement l’ambiance bouillonnante et chaotique du palais qui contraste avec le caractère poli et sucré de sa nouvelle reine. De plus, le destin tragique de certains personnages nous rappelle que les enjeux de cette histoire sont avant tout dramatiques, que l’on n’est pas seulement dans une farce et que la cruauté est bien réelle. Cette faculté à associer la violence et la drôlerie, le kitch et la débauche, la réalité historique et le fictif fait de « The great » une série vivifiante et pleine de souffle, portée par deux comédiens formidables.

 

 

Et maintenant ?

 

Reste maintenant à savoir quelle sera la direction prise par les auteurs d’un point de vue narratif (la fin de la saison 1 se termine de manière très bizarre, comme s’il manquait un épisode) mais aussi du ton qui sera adopté lors d’une saison 2 prometteuse. « Huzzah ! » .

 

Disponible sur StarzPlay.  

 

 

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