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The expanse (6 saisons)

La lutte aux ressources

 

23ème siècle. La Terre surpeuplée est dirigée par les Nations Unies. Mais certains de ses habitants ont abandonné cet ancien paradis maltraité par les humains pour entreprendre le colossal projet de terraformer Mars et de bâtir ainsi sur plusieurs générations ce havre de paix que La Planète Bleue ne sera jamais plus. Depuis, les Martiens, devenus indépendants au grand dam de la Terre, ont su développer une puissance militaire redoutable qui leur permet d’assurer leur sécurité. De plus, pour que chacune de ces deux puissances puisse subvenir à ses besoins, elles doivent se pourvoir de matières premières dont seule la ceinture d’astéroïdes est pourvue. Des hommes et des femmes creusent donc, travaillent et vendent des ressources à des planètes peu scrupuleuses lorsqu’il s’agit d’exploiter une population en manque constant d’eau et d’oxygène. Les conditions de vie de ces Ceinturiens est si âpre que plusieurs factions prônent la révolte contre des Intérieurs (Terriens et Martiens réunis) qui les pillent sans se soucier de leur bien-être. Dans ce contexte tricéphale au bord de l’explosion, un Terrien vivant sur l’astéroïde Cérès est chargé d’enquêter sur la disparation d’une jeune femme tandis que dans l’espace, un petit groupe d’hommes et de femmes se charge de secourir un vaisseau à la dérive dont émane un étrange signal de détresse.

 

 

Les codes de la SF respectés

 

Se plonger dans « The Expanse », c’est, au départ, espérer retrouver le parfum si particulier de la science-fiction : ses univers galactiques, ses combats spatiaux, ses trouvailles technologiques et futuristes, ses extraterriens… Et de ce point de vue,  The Expanse » contient tous les ingrédients inhérents aux grandes sagas du genre, à commencer par l’unique et inégale « Battlestar Galactica » dans une ambiance certes différente, mais qui n’a rien à envier à celle de sa grande sœur. Tout d’abord, les effets spéciaux sont de grande qualité et l’image est impeccable. Dans le silence céleste, quand les ogives nucléaires ne traversent pas l’écran pour détruire un potentiel ennemi, seul le bruit saccadé et chuintant de quelques réacteurs se fait entendre. Parallèlement, le sort de l’humanité se joue également en coulisse où complots et manigances se trament aussi bien sur Terre et sur Mars que dans la ceinture d’astéroïdes.

 

 

Des enjeux proprement relatés

 

Trois peuples, trois ambiances donc. Mais on peut cependant regretter que leur description soit inéquitablement développée. En effet, si le monde bigarré et tumultueux des Ceinturiens a le droit à une peinture assez précise et superbement mise en images, celui des Martiens est plutôt délaissé. Quant aux Terriens, seule une scène nous laisse entrevoir les conditions de vie calamiteuse d’une population ignorée de ses gouvernants. Alors, si pendant deux saisons et demie, le plaisir est vraiment au rendez-vous, c’est que la narration alterne intelligemment scènes d’actions rondement menées et enjeux diplomatiques, forcément plus bavards mais jamais ennuyeux. Ces derniers mettent assez bien en évidence les tensions existantes entre trois entités aux intérêts divergents tout en soulevant des questions toujours intéressantes à défaut d’être originales : à qui profiterait la guerre si elle avait lieu, comment l’empêcher et que faire de technologies qu’on ne maîtrise pas ? On appréhende cette « guerre froide » à travers le regard de la sous-secrétaire adjointe pour les Nations-Unies, Avasarala, femme forte à la personnalité fouillée et dont l’évolution constitue l’un des points forts de la série. Ainsi, le duel qu’elle livre avec Errinwright au sommet du pouvoir est, à n’en pas douter, un des aspects du récit les plus surprenants d’un point de vue scénaristique.

 

 

Des saisons inégales

 

Mais pour trouver « l’action » proprement dite, il faut s’éloigner de la Terre et de ses imbroglios politiques. En effet, si celle-ci se concentre tout d’abord sur l’astéroïde Cérès via son charismatique inspecteur Miller, elle se voit rapidement attribuée à un groupe d’individus d’origines diverses amenés à cohabiter à bord d’un vaisseau qu’ils baptisent « Rocinante ». Dès lors, ceux-ci auront fort à faire aux quatre coins de la galaxie. Ils deviendront par là-même nos points de repères et les vrais héros de cette aventure, pour notre plus grand plaisir.

 

Mais alors que l’intensité était à son comble, au beau milieu de la saison 3 survient un changement de rythme surprenant dont le contenu contribue à donner un sens au titre de la série. Plus vaporeux, ces épisodes ne manquent pas d’audace. Jouant sur leur atmosphère plus que sur leur contenu, ils s’avèrent toutefois moins trépidants que ce à quoi la série nous avait habitué. Cette transition nous conduit vers de nouvelles problématiques et de nouveaux univers… pour déboucher sur une saison 4 qui ne restera pas dans les annales. Scènes martiennes au rythme laborieux se permettant d’incorporer des personnages sans consistance narrative, enjeux familiaux au goût de « déjà-vu » d’où ne se dégage aucune émotion, scènes catastrophistes assez proches de navets à la « Armaggedon » (ah, ces vers mortels disparaissant miraculeusement à l’approche d’une issue heureuse !), épilogue plus ridicule qu’excitant (pauvre Miller !)... : bref, un ratage ! De sorte qu’on en oublie même de se demander, comme le propos le suggère, si oui ou non, la sauvagerie constitue un préambule nécessaire à l’instauration d’une civilisation éduquée. De toute façon, la série se permet de répondre toute seule à cette question morale sans nous demander notre avis.

 

 

Des personnages différemment consistants

 

Heureusement, la fin de cette saga relève la tête en recentrant son action là où elle se sent le plus à l’aise : dans l’espace. De plus, elle réintégre dans sa narration la majeure partie des personnages qui avaient jusqu’ici fait son sel. Pourtant, si la série prouve ainsi qu’elle ne laisse personne sur le carreau, « The Expanse » manque tout de même de figures hautes en couleur. Certes, Drummer et son comparse Ashford dégagent une identité forte et bienvenue. Mais que penser de la journaliste Monica Stuart ou du pasteur Anna Volovodov si ce n’est qu’ils sont plutôt inconsistants ? De même, une fois leurs caractères dévoilés, quelle profondeur nouvelle dans leur manière d’être au monde peut-on évoquer quand on parle du pilote Alex (aussi sympathique soit-il), de Naomi Nagata (même remarque) ou du sergent Drapper ? Et si Jim Holden est bien le héros de cette histoire, l’acteur qui l’interprète brille surtout par son manque d’expressivité. Au final, outre Avasarla et Miller, seul Amos Burton, la brute de la bande, apporte une humanité bestiale et complexe à un personnage tout en nuances. Nuances qui ne sont pas non plus le point fort du méchant de cette fin d’aventure si ce n’est qu’il aime son fils. Ce dernier, en revanche, a le droit à un traitement de faveur puisque son évolution psychologique est pour le coup habilement développé. Heureusement pour eux tous, l’ensemble des dialogues s’avère être de qualité : tantôt subtils, tantôt sensibles, ils sauvent bien souvent les personnages qui les incarnent.

 

 

Bilan

 

Pour conclure, si l’épilogue est globalement réussi, on a quand même le sentiment qu’il manque encore des pièces au puzzle. Une suite était-elle envisagée ? Possible. Mais quoi qu’il en soit, malgré des personnages plutôt linéaires, des passages à vide et un manque d'intensité narrative, « The expanse » se regarde avec un réel plaisir. Ce n’est en effet pas tous les jours que l’on peut assister à un spectacle mêlant univers SF variés, intrigues politiques, combats exaltants et scénario cohérent. Alors profitons-en !

 

Disponible sur Prime Video

 

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