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Vigil (saison 1)

Meurtre dans un sous-marin

 

C’est exigu un sous-marin ! Déambuler tranquillement dans ses couloirs sans se faire de bleus relève presque de la discipline sportive. Pourtant, en dépit de l’hostilité intrinsèque à ce genre d’embarcation, Amy Silva n’a d’autre choix que de prendre place à l’intérieur du Vigil, un sous-marin nucléaire britannique sillonnant les côtes écossaises, pour enquêter sur la mort suspecte d’un des membres de son équipage. De plus, malgré les doutes concernant les circonstances du drame, elle ne bénéficie pas d’un accueil des plus cordial.Sur ce genre de rafiots, la vie n’est, de base,pas de tout repos. Le travail y est exigeant ; les conditions de vie, frustes. Alors, quelles que soient les circonstances,il faut continuer à exercer sa fonction : prendre son quart, tenter de se reposer pour être opérationnel. Ici, aucune défaillance n’est autorisée et si les ordres à son bord sont stricts, c’est que le contenu de son chargement l’exige. Par ailleurs, il est indispensable de cacher sa position à « l’ennemi » : pour cette raison, ceux qui sont en charge de ce type de bâtiments ne se considèrent jamais en paix. Craig Burke est mort. C’est triste mais peu de monde l’aimait de toutes façons. Il était une source d’ennuis notoires. Alors quand Amy commence à évoquer un éventuel homicide, le commandant Newsome craint les conséquences d’une telle annonce sur la capacité de l’équipage à exercer sa mission dans des conditions optimales. Elle devient de fait persona non grata auprès de la direction mais aussi de l’ensemble des matelots, inquiets à l’idée que l’enquête dévoile le caractère répréhensible de certains de leurs faits et gestes passés. Elle serait donc totalement seule si, à la surface, son ancienne conjointe, Kirsten Longacre, n’enquêtait pas de son côté pour en apprendre un peu plus sur le Vigil et son équipage.

 

 

Un huis-clos efficace

 

Quoi de mieux que de placer une affaire de meurtres dans un espace confiné et labyrinthique où personne ne peut ni entrer, ni sortir ? Dans ce type d’environnement, se met rapidement en place un perfide jeu du chat et de la souris impliquant les fauteurs de troubles et ceux qui essaient de les coincer. Un jeu éreintant pour ses participants mais souvent très stimulant pour le spectateur. Qu’un criminel parvienne à se faufiler à l’intérieur d’un sous-marin et la chasse à l’homme n’en devient que plus intense. C’est la principale volonté de « Vigil » que de chercher à insuffler à son huis-clos une atmosphère étouffante. L’idée de rendre difficile la communication avec la terre ferme est sur ce plan un élément scénaristique tout à fait convaincant. De cette manière, le sentiment d’isolement se fait plus prégnant encore. De plus, la tension s’accroît de manière efficace au fur et à mesure que le puzzle des événements se reconstitue sous nos yeux sans que quiconque ne soit épargné par les soupçons. Le rythme se fait ainsi grandissant jusqu’à un affrontement final tout à fait réussi. Bref, comme souhaité par les auteurs, on succombe à l’envie de savoir comment le Vigil peut se sortir des situations scabreuses dans lesquelles un être aux intentions malveillantes et inconnues l’a fourré. Un être dont on cherche, à l’instar d’Amy, à connaître l’identité !

 

 

Au-dessus du niveau de la mer

 

 

Malgré ces qualités indéniables, la série peine parfois à totalement nous emporter dans son sillage. On pourrait penser que la partie émergée de son intrigue contribue à rompre le climat pesant sur lequel se base la série pour séduire. C’est un peu vrai mais on ne peut pas reprocher à cette dernière son manque d’intérêt.Les auteurs ont sur ce plan parfaitement réussi à former un tout cohérent en intriquant intelligemment les deux volets de leur histoire. Non, l’enquête de Kirsten n’est pas accessoire. Au contraire !En plus de contenir sa dose de suspense, elle représente surtout le pendant politique de cette sombre farce dont les conséquences s’avèrent désastreuses. Et si« Vigil » nous parle de désarmement nucléaire, il montre aussi que le terme de guerre peut revêtir des formes plus larvées que le simple citoyen n’est en mesure de percevoir. C’est très bien vu.

 

 

Une romance mal exploitée

 

Alors, décidément, qu’est-ce qui cloche avec « Vigil » ? Si on peut lui adresser des reproches, ils se portent plus sur l’aspect stéréotypé de sa construction et les effets néfastes que cela procure chez le spectateur. Déjà, il est regrettable que tous les épisodes suivent la même structure narrative caractérisée ici par la traditionnelle scène d’action finale et le cliffhanger plus ou moins habile qui lui succède. Mais c’est surtout lorsqu’elle tente de concilier suspense et intimité que la série se montre d’une grande maladresse. Les auteurs ont en effet cherché à humaniser leurs héroïnes en leur faisant vivre une histoire d’amour contrariée et en attribuant un passé endeuillé à l’une d’entre elles. C’est louable. Mais les souvenirs les assaillent toujours au moment où elles se trouvent en mauvaise posture. De la romance traditionnelle, avec ce qu’elle comporte de musique mélancolique et de rires révolus, s’immisce donc au travers des scènes les plus haletantes du récit. Non seulement l’aspect systématique de ce procédé lasse rapidement mais cela édulcore l’âpreté des situations vécues. De fait, malgré les dangers auxquels Amy doit faire face, un souvenir émouvant suivi de quelques larmes versées suffisent à nous convaincre qu’elle finira par s’en tirer à bon compte. Or, il y avait moyen de mettre sa vie en jeu et de trembler avec elle. Mais non… Trop d’émotions, trop de regrets nécessitent d’être mis en mots avant que les auteurs se permettent de la faire passer de vie à trépas. Il reste à espérer que le traitement des intrigues secondaires mettant en jeu le duo Amy et Kirsten soient mieux exploités au cours de la seconde saison car, hormis le fait qu’elles apparaissent comme des professionnelles hors-pair, on en apprend finalement assez peu les concernant.

 

 

Bien mais peut mieux faire

 

On trouve donc dans « Vigil »un nombre important d’éléments propres à satisfaire le féru d’enquêtes policières tortueuses.Elle en utilise les codes et le ton (assez monocorde) avec une certaine dextérité mais elle manque aussi de tranchant au moment d’élever d’un cran sa tension dramatique. Cela dit, difficile de ne pas louer la qualité d’écriture de son intrigue bicéphale dont le sujet relève presque de l’anticipation un brin angoissante. A moins que les travers sociétaux dont elle se fait le reflet n’aient déjà contaminé les sphères politiques à un point que l’on ne mesure pas... Auquel cas, on a bien du souci à se faire. Elle relate par ailleurs avec efficacité les conditions de vie extrêmes de militaires auxquels il est demandé une irréprochabilité de tous les instants. Tous ces aspects cumulés, on obtient une série classique dans son genre mais plutôt agréable,dont la prétention principale consiste à nous narrer une histoire riche en rebondissements. C’est déjà pas mal.

 

Disponible sur My Canal

 

 

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